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Edition numérique © cmft, octobre 2008
J’étais malade et vous m’avez visité. (Math. 25,36)
1. On suppose en général que les moyens de grâce et les ordonnances de Dieu sont des mots synonymes, dont on se sert ordinairement pour désigner les œuvres de piété, comme écouter et lire la Bible, recevoir la cène, la prière publique et secrète, et le jeûne. Et il est certain que ces moyens de grâce sont les canaux ordinaires qui portent aux âmes des hommes la grâce de Dieu. Mais n’y en a-t-il point d’autres ? N’y a-t-il pas encore quelques moyens de grâce par lesquels Dieu veut quelquefois, même ordinairement, communiquer ses grâces à ceux qui le craignent ou qui l’aiment ? — Sans aucun doute, il y a des œuvres de miséricorde, aussi bien que des œuvres de piété, qui sont de vrais moyens de grâce. — Ces œuvres de miséricorde sont surtout des moyens de grâce pour ceux qui les pratiquent avec un œil net, avec une intention pure ; et quant à ceux qui les négligent, ils ne reçoivent pas ces grâces qu’ils auraient eues, s’ils les eussent pratiquées : ils perdent même, en continuant à les négliger les bénédictions qui leur ont été accordées. N’est-ce pas là ce qui fait que plusieurs, jadis forts dans la foi, sont maintenant faibles et débiles ? Et toutefois, comme ils ne négligent aucun des premiers moyens de grâce mentionnés, ils ne savent pas d’où vient cette faiblesse ; ce qu’il leur serait facile d’apprendre cependant, s’ils considéraient sérieusement l’exposé du caractère des vrais fidèles que trace l’apôtre St. Paul dans ces paroles : nous sommes son ouvrage, étant créés en Jésus-Christ pour les bonnes œuvres, que Dieu a préparées, pour que nous marchions en elles. (Eph. 2,10)
2. Marcher en ces œuvres est essentiellement nécessaire, pour que nous conservions cette foi, par laquelle nous sommes déjà sauvés par grâce, et pour que nous parvenions au salut éternel. Nous n’en douterons pas si nous considérons avec attention ces paroles prononcées par le grand Juge lui-même : venez, les bénis de mon père, possédez en héritage le royaume qui vous a été prépare dès la fondation du monde ; car j’ai eu faim, et vous m’avez donné à manger ; j’ai eu soif, et vous m’avez donné à boire ; j’étais étranger, et vous m’avez recueilli ; j’étais nu, et vous m’avez vêtu ; j’étais malade, et vous m’avez visité ; j’étais en prison, et vous êtes venu vers moi. (Math. 25,34 etc.) — En vérité, je vous dis qu’en tant que vous avez fait ces choses à l’un de ces plus petits de mes frères, vous me l’avez fait à moi-même. — Si quelqu’un n’est pas convaincu par ces passages que la pratique des œuvres de miséricorde, est nécessaire au salut, qu’il considère ce que le juge de tous les vivants dira à ceux qui sont à sa gauche : maudits, retirez-vous de moi, et allez au feu éternel, qui est préparé au diable et à ses anges. Car j’ai eu faim, et vous ne m’avez pas donné à manger ; j’ai eu soif, et vous ne m’avez pas donné à boire ; j’étais étranger, et vous ne m’avez pas recueilli ; j’ai été nu, et vous ne m’avez point vêtu ; j’ai été malade, et en prison, et vous ne m’avez point visité. — En vérité, je vous dis que parce que vous n’avez point fait ces choses à l’un de ces plus petits, vous ne me l’avez point fait aussi. — Or, ne fut-ce que pour cela ils doivent se retirer de Dieu pour aller aux punitions éternelles.
3. N’est-il pas étrange que cette importante vérité soit si peu comprise par ceux qui craignent Dieu, ou du moins qu’elle exerce si peu d’influence sur leur conduite ? Dans la supposition que cet exposé soit juste, que le Juge de toute la terre dise la vérité, ceux-là seuls qui nourrissent les affamés, qui donnent à boire aux altérés, qui vêtent les indigents, qui recueillent les étrangers, qui visitent les prisonniers, selon leur pouvoir et l’occasion, ceux-là seuls hériteront le royaume éternel ; et ceux qui ne font pas ces choses, iront au feu éternel préparé pour le diable et ses anges.
4. Je me propose maintenant de concentrer mon discours sur un seul de ces points : — la visite des malades, un devoir que toute personne bien portante peut plus ou moins pratiquer, et qui cependant est bien négligé, même par celles qui professent d’aimer Dieu. Je vais donc examiner :
1. Ce que c’est que visiter les malades ;
2. De quelle manière on doit pratiquer ce devoir ;
3. Et qui doit le pratiquer.
I.
J’ai à examiner la nature de ce devoir, ou ce que c’est que visiter les malades.
1. Par malades, je n’entends pas uniquement ceux qui gardent leur lit, ou qui sont malades dans toute la force du mot ; j’entends par là tous ceux qui sont dans un état d’afflictions corporelles, ou spirituelles, qu’ils soient pieux ou méchants, qu’ils craignent le Seigneur ou ne le craignent pas.
2. Mais est-il nécessaire de visiter les malades en personne ? Ne peut-on pas le faire sans les voir ? Cela ne répond-il pas au même but, si on leur fait remettre des secours ? — Plusieurs personnes sont dans des circonstances qui ne leur permettent pas de visiter les malades ; et quand c’est là le cas, c’est assez pour elles de leur faire porter des secours, puisqu’elles n’ont pas d’autre moyen. Mais ce n’est pas à proprement parler visiter les malades ; c’est une toute autre chose : faire remettre des secours aux pauvres, est un devoir qu’il ne faut pas négliger ; les visiter est un autre devoir tout aussi important.
Mais j’envoie à ceux qui sont malades un médecin, qui peut leur être plus utile que moi. — Cela est vrai : dans un sens, il peut être plus utile que vous à leur santé corporelle ; mais il ne peut pas être plus utile à leurs âmes, qui sont d’une bien plus haute importance que leurs corps. Et s’il le pouvait, cela ne vous excuserait pas : en faisant son devoir, il ne ferait pas le vôtre. Vous n’en retireriez d’ailleurs aucun profit pour vous-même : si vous ne les visitez pas, vous négligez un moyen de grâce ; vous perdez une excellente occasion d’augmenter votre reconnaissance envers le Dieu qui vous préserve de la souffrance, et qui vous conserve en force et en santé, — et d’augmenter votre sympathie pour les affligés, votre bienveillance et vos affections sociales.
3. C’est surtout parce qu’ils ne visitent pas les pauvres, que les riches éprouvent si peu de sympathie pour eux ; — voilà pourquoi, selon une observation générale, la moitié des hommes ne savent pas ce que souffre l’autre moitié : la plupart d’entre eux ne le savent pas, parce qu’ils ne se soucient pas de le savoir ; ils se mettent en dehors du moyen de le savoir, et puis ils allèguent pour excuse leur ignorance involontaire ! — Je suis riche, assure quelqu’un, et généreux ; mais pour dire la vérité, je ne connais personne qui soit dans le besoin. — D’où vient cela ? — Certes cet homme riche a bien soin de s’éloigner des pauvres, et s’il en rencontre un, comme par hasard, il passe de l’autre côté.
4. Comme la conduite et l’esprit des personnes dans une nation voisine, même parmi celles qui appartiennent à un très haut rang, sont différents ! A Paris, les dames de la première société, même des princesses de la famille royale visitent constamment les malades, surtout ceux qui sont aux hôpitaux. Et, non seulement elles leur remettent des secours, quand ce qu’ils ont ne leur suffit pas, mais elles les soignent, pansent leurs plaies, et leur rendent les plus petits services. Voilà un exemple pour les Anglais, qu’ils soient riches ou pauvres, bas ou haut placés dans la société ! Depuis plusieurs années, nous avons assez imité les folies des Français : imitons une fois leur sagesse, leur vertu, digne d’être imitée par tout le monde chrétien. Que les dames respectables, que les comtesses même n’aient pas honte d’imiter ces princesses du sang ! — C’est une mode qui fait honneur à la nature humaine : elle a commencée en France ; mais Dieu veuille qu’elle ne finisse pas là !
5. Si votre délicatesse ne vous permet pas d’imiter ces personnes vraiment honorables, en vous humiliant de la même manière qu’elles s’humilient, en rendant comme elles les plus petits services aux malades, vous pouvez cependant, sans aller aussi loin, fournir à ces malheureux ce dont ils ont besoin ; et surtout vous pouvez leur être plus utile encore en leur donnant des instructions religieuses, si elles leur sont nécessaires, en essayant de leur montrer que par le péché leur situation morale est très dangereuse, et en leur montrant l’agneau de Dieu qui ôte les péchés du monde. — Outre ces instructions générales, vous auriez souvent occasion de consoler ceux qui souffrent dans leur corps ou dans leur esprit, — d’encourager les faibles, — de relever ceux qui sont abattus, — de fortifier ceux qui ont cru et de les engager a s’avancer vers la perfection. Mais ces choses, vous devez les faire vous-même : vous voyez qu’elles ne peuvent être faites au moyen d’un représentant. Et, supposez que vous puissiez, au moyen d’un autre, procurer quelque soulagement aux pauvres, vous ne pouvez pas en retirer le même avantage : vous ne pouvez pas en retirer cette augmentation d’humilité, de patience, de bienveillance, de sympathie pour les affligés, que vous auriez pu en retirer, si vous les aviez visités vous-même ; d’ailleurs, vous n’en recevrez pas la même récompense au grand jour du jugement, alors que tout homme recevra sa rémunération selon son travail.
II.
1. Je vais examiner, en second lieu, de quelle manière nous devons visiter les pauvres. — Comment cette œuvre d’amour peut-elle être le mieux accomplie pour la gloire de Dieu et pour le bien de notre prochain ? — Or, avant d’entreprendre cette œuvre, vous devez être profondément convaincu que vous n’êtes pas suffisant pour ces choses, et que vous n’avez ni assez de grâce, ni assez d’intelligence pour l’accomplir le mieux possible. Cette conviction vous montrera la nécessité de vous adresser à Celui qui donne la force, et de recourir au Père des lumières, au Dispensateur de tout don parfait, afin de recevoir de lui la sagesse, vous rappelant qu’il y a un Esprit qui la communique, et une inspiration du Très Saint qui donne l’intelligence. C’est pourquoi, quand vous êtes sur le point de vous mettre à l’œuvre, cherchez en Dieu ces secours par d’ardentes prières : criez à lui pour qu’il vous accorde une véritable humilité, de peur que l’orgueil, en s’emparant de vous et vous faisant attribuer à vous même quelque mérite, ne perde votre âme, tandis que vous cherchez à sauver celle des autres. Commencez et poursuivez cette œuvre dans un esprit de prière, demandant toujours au Seigneur toute la douceur, toute la patience dont vous avez besoin pour n’être ni irrité, ni découragé par divers traitements auxquels vous êtes exposés. Ne soyez pas rebutés par la profonde ignorance des uns, par l’étonnante stupidité des autres. Ne vous étonnez pas de leur dureté, de leur malhonnête, de leur absence de progrès malgré toutes les peines que vous vous donnez : ne soyez même pas surpris s’il y en a qui retournent vers la perdition, et qui deviennent pires qu’auparavant.
2. Quant à la méthode à suivre dans vos visites auprès des malades, il n’est pas nécessaire de vous lier à une seule : il vaut mieux varier vos moyens selon les circonstances. Cependant ce ne sera pas mal, en général, de commencer en vous informant de leur situation temporelle : vous pouvez leur demander s’ils ont ce qui est nécessaire à la vie ; si leur nourriture et leurs vêtements leur suffisent ; quand il fait froid, s’ils ont assez de feu ; si on les soigne bien ; s’ils ont, pour ce qui regarde la santé de leur corps, les avis d’un habile médecin sur plusieurs de ces points, vous pouvez leur donner quelques secours, et surtout vous pouvez exciter ceux qui sont plus capables que vous à faire ce que vous ne sauriez faire. — Quand il s’agit de vous, avec juste raison vous pouvez dire : j’ai honte de mendier ; mais n’ayez jamais honte de mendier pour les pauvres ; soyez dans ce cas un mendiant importun : n’acceptez pas facilement un refus ; servez-vous de toute votre intelligence, de toute votre influence, vous confiant toujours à Celui qui a les cœurs de tous les hommes entre ses mains.
3. Il vous sera facile de voir alors s’il y a quelques services que vous puissiez vous-même rendre aux malades. En général les personnes qui les entourent peuvent mieux faire que vous ; mais peut-être avez-vous plus d’habileté ou d’usage qu’elles pour certaines choses ; si c’est là le cas, ne vous laissez pas arrêter par une fausse délicatesse ou par un faux honneur : rappelez-vous cette parole du Maître : en tant que vous avez fait cela à l’un de ces plus petits, vous me l’avez fait ; et ne pensez pas qu’aucune chose soit trop vile, quand il s’agit de Christ : réjouissez-vous d’être abaissés pour l’amour de lui.
4. Ces petits offices d’amour vous mettront sur la voie pour des services d’une plus haute importance. Après avoir montré de l’intérêt pour leur corps, vous pouvez leur adresser quelques questions sur l’âme. Ici, un vaste champ s’ouvre devant vous, ou vous pouvez déployer tous les talents que Dieu vous a confiés ; vous pouvez leur adresser des questions analogues à celles-ci : — avez-vous jamais pensé quelquefois que c’est Dieu qui gouverne le monde, et que sa providence veille sur toutes les créatures et sur vous en particulier ? Quelque chose peut-il donc vous arriver sans sa connaissance, et sans qu’il le permette pour votre bien ? Il connaît vos souffrances, vos besoins ; il voit votre affliction dans toutes ses plus petites circonstances. — Ne regarde-t-il pas du ciel sur toutes ces choses, et ne les dispose-t-il pas pour votre bien ? — Vous pouvez ensuite vous informer s’il connaît les principes généraux de la religion ; puis, avec amour et prudence, rechercher si sa vie a été conforme à ces principes, ou s’il a été un pécheur débouté, scandaleux. Après cela, voyez s’il a une idée de ce que c’est qu’adorer Dieu en esprit et en vérité ; si vous trouvez qu’il ne le sait pas, efforcez-vous de lui montrer que sans la sanctification nul ne verra le Seigneur, et que si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu. Lorsqu’il commencera à comprendre la nature de la sainteté et la nécessité de la nouvelle naissance, vous devez l’exhorter à la repentance envers Dieu et à la foi au Seigneur Jésus-Christ.
5. Quand vous apercevez que quelques-uns d’entre eux commencent à craindre Dieu, il conviendrait de leur donner un écrit simple. A votre prochaine visite, vous pouvez leur demander ce qu’ils ont lu, ce qu’ils en ont retenu, ce qu’ils en ont compris ; après quoi vous devez développer ce qu’ils comprennent, et si cela est possible, l’imprimer sur leur cœur. Surtout terminez chaque visite par la prière, si vous ne pouvez pas prier sans un formulaire, faites usage de l’un de ces ouvrages qui contiennent d’excellentes prières ; mais plus vite vous romprez cette fausse honte, mieux cela sera. Demandez à Dieu qu’il ouvre vos lèvres, et il le fera.
6. Outre ces importantes leçons que vous vous efforcez de donner aux pauvres, quand vous les visitez, vous feriez une œuvre de charité si vous leur enseigniez deux autres principes, savoir l’ordre et la propreté. Un homme pieux disait que la propreté vient après la sainteté ; ce qu’il y a de certain c’est que le manque de propreté est un scandale contre la religion et fait mal parler de la vérité. Et sans activité, nous ne sommes propres ni à ce monde, ni au monde à venir : En tout ce qui concerne ces deux mondes, fais selon ton pouvoir tout ce que tu auras moyen de faire.
III.
1. La troisième question à considérer est celle-ci : par qui ce devoir doit-il être observé ? La réponse est prête : par tous ceux qui désirent hériter le royaume céleste qui a été préparé pour eux dès la fondation du monde. Car, ainsi a dit le Seigneur : venez, les bénis de mon père, possédez en héritage le royaume ; car j’étais malade et vous m’avez visité. Et à ceux qui seront à sa gauche, il leur dira : maudits, retirez-vous de moi ; car j’ai été malade et vous ne m’avez pas visité : — Or, ces paroles n’impliquent-elles pas que comme tous ceux qui observent ce devoir sont bénis et posséderont le royaume, de même tous ceux qui ne l’observent pas sont maudits, et iront aux peines éternelles ?
2. Il importe donc à tous ceux qui désirent échapper à la colère à venir et posséder le royaume éternel, de pratiquer selon leur pouvoir, cet important devoir : vieux et jeunes, riches et pauvres, hommes et femmes, sont tenus de le faire. Personne n’est trop jeune, quand on veut sauver son âme, pour être dispensé d’assister son prochain. Personne n’est assez pauvre, à moins que de manquer des choses nécessaires à la vie, pour ne pas être appelé à faire quelque chose, plus ou moins, et quand cela est possible, pour le soulagement et le bien de leurs frères affligés.
3. Mais les riches de ce monde, qui possèdent plus que les choses nécessaires à la vie, sont particulièrement appelés de Dieu à cette belle œuvre et mis à part pour elle par la divine providence. N’étant pas obligés de travailler pour gagner votre pain, votre temps, riches, est à votre disposition : vous pouvez donc en mettre à part une partie chaque jour, pour cette œuvre d’amour. Si c’est possible, fixez une heure pour cela, et ne l’employez pas à autre chose sans une pressante nécessité. Votre position présente aussi un avantage tout particulier sur les autres, parce que votre rang élevé vous donne de l’influence. Vos inférieurs sans aucun doute vous regardent avec respect ; et la condescendance que vous leur montrez, en les visitant, les dispose à vous écouter avec attention et à recevoir volontiers tout ce que vous dites. Servez-vous bien de cette disposition pour le bien de leur âme et de leur corps ; tout en étant le guide de l’aveugle, le soutien des impotents, le père de l’orphelin, le mari de la veuve, ayez toujours en vue ce grand but, savoir le salut de leur âme ; et voyez que tout ce que vous dites et faites tende là.
4. Mais les pauvres ont-ils quelque chose à faire avec ce devoir ? Doivent-ils aussi visiter les pauvres ? — Ceux qui ont à peine les choses nécessaires à leur existence, peuvent-ils secourir les autres ? — S’ils n’ont rien à donner, il n’est pas nécessaire pour cela de les exclure de la bénédiction qui accompagne la pratique de ce devoir. Ils peuvent encore se rappeler cette règle excellente : les nécessités de notre prochain doivent passer avant nos commodités ; et les extrémités de notre prochain avant nos nécessités. Il y a peu de gens assez pauvres pour ne pas pouvoir donner deux mites ; et si quelqu’un ne peut même pas aller jusque-là, il peut donner ce qui est d’un prix bien plus élevé, ce qui vaut mieux que tout l’or d’un monde : il peut leur parler du Seigneur Jésus. Or si vous parlez au nom de Jésus de Nazareth, vos paroles ne peuvent-elles pas être la cause de la santé spirituelle du pauvre que vous visitez ? — Ne pouvez-vous leur rien donner ? Certes, en leur administrant la grâce de Dieu, vous leur donnez plus que ce monde ne vaut. Va, disciple pauvre d’un maître pauvre, fais comme il faisait dans les jours de sa chair : quand tu en as l’occasion, va de lieu en lieu faisant le bien, guérissant tous ceux qui sont opprimés par le diable, et les encourageant à secouer les chaînes et à se réfugier entre les mains de Celui qui délivre les prisonniers ; par dessus tout, accordes-leur tes prières : pries avec eux ; et qui sait si tu ne les rendras pas à la vie ?
5. Vous qui êtes avancés en âge, et sur le point de descendre dans la tombe, ne pouvez-vous pas faire un peu plus de bien, avant votre départ de ce monde. Rappelez-vous que, c’est alors le temps de bien vivre, et de bien employer les dernières heures de votre existence. Vu votre âge, on peut espérer que vous avez acquis une science qui peut être utile aux autres. Vous avez certainement cette connaissance des hommes que l’on achète par de pénibles expériences. Employez les moments et la force qui vous restent au bien de ceux qui sont plus faibles que vous. — Vos cheveux blancs ne peuvent manquer de vous donner de l’autorité et d’ajouter du poids à ce que vous dites. Pour réveiller leur attention, vous pouvez souvent leur dire : — croyez moi, jeunes gens ; car j’ai lu dans les soucis humains, et plus de soixante années pèsent sur moi. — Vous avez souffert souvent, et peut-être souffrez-vous encore : c’est pourquoi procurez-leur tous les secours que vous pouvez, et pour l’âme et pour le corps, avant que vous et eux n’alliez à ce lieu d’où vous ne reviendrez pas.
6. D’un autre côté, vous, qui êtes jeunes, vous avez plusieurs avantages qui vous sont particuliers : vous jouissez en général d’une vivacité d’esprit, d’une force de tempérament, qui par la grâce de Dieu vous font entreprendre volontiers, et avec succès plusieurs bonnes œuvres par lesquelles d’autres que vous seraient découragés ; — Votre santé et les forces de votre corps vous qualifient aussi très bien pour secourir les malades : —vous êtes capables de supporter les croix auxquelles on doit s’attendre dans une telle manière de se conduire. Employez donc toute la vigueur de votre corps et de votre esprit au service de vos frères affligés, et bénissez le Seigneur de ce que vous pouvez la consacrer à ce but, agissant ainsi comme les célestes serviteurs du Très Haut qui font sa volonté en servant toujours les héritiers du salut.
7. Mais les femmes ne peuvent-elles pas, aussi bien que les hommes, prendre part à cet honorable service ? Sans aucun doute : elles le doivent même ; c’est leur privilège, c’est leur devoir ; dans ce cas il n’y a point de différence : en Christ il y a ni homme ni femme. A la vérité c’est une maxime chez de certaines personnes que les femmes doivent se faire voir et jamais se faire entendre ; c’est pour cela que plusieurs d’entre elles sont élevées, comme si elles étaient destinées à être d’agréables jouets. Mais est-ce là honorer le sexe ? — Est-là de la bienveillance ? Non, c’est de la plus horrible cruauté ; c’est une véritable barbarie turque. — Et je ne vois pas comment une femme de tête et de cœur veut s’y soumettre. Femmes, quand vous le pouvez, revendiquez les droits que le Dieu de la nature vous a donnés. Ne vous soumettez pas plus longtemps à ce vil esclavage ! Vous êtes, tout aussi bien que les hommes, des créatures raisonnables ;—comme eux, créées à l’image de Dieu, des candidats à l’immortalité ; — Vous aussi vous êtes appelées de Dieu à faire du bien à tous les hommes, selon le temps que vous avez. Ne soyez pas infidèles à votre céleste vocation. Quand l’occasion se présente, faîtes à votre prochain pauvre et malade tout le bien que vous pouvez lui faire. Et vous aussi vous recevrez votre récompense, selon votre travail.
8. C’est un fait bien connu, que dans l’église primitive, il y avait des femmes particulièrement chargées de la visite des malades : chaque assemblée chrétienne en avait une ou plusieurs, qui portaient le nom de diaconesses, c’est-à-dire servantes, par ce qu’elles servaient l’Eglise et son grand Maître. Telle était Phoebé, dont parle St. Paul, la diaconesse de l’Eglise de Cenchrée. — A la vérité ces femmes étaient avancées en âge, et avaient une grande expérience de l’œuvre de Dieu. Mais les jeunes étaient-elles entièrement exclues de ce service ? — Non ; et il n’est pas nécessaire de les en exclure, pourvu qu’elles sachent en qui elles ont cru, et qu’elles montrent la pureté de leur cœur par la pureté de toute leur conduite. La Miranda de M. Law, si elle répondait à son portrait, était une telle diaconesse. Quelqu’un voudrait-il objecter aux visites qu’elle faisait aux pauvres malades, aux services qu’elle leur rendait, parce qu’elle était femme et jeune ? Y en a-t-il, parmi vous qui êtes jeunes, une qui désire marcher sur ses traces ? — Avez vous une figure agréable, une aimable manière de vous présenter ? — Tant mieux, si vous êtes entièrement dévouée à Dieu. Le Seigneur se servira de ces qualités, si votre œil est net, pour rendre vos paroles plus pénétrantes. — Or, tandis que vous vous rendez ainsi utile aux autres, que de bénédictions vous pouvez recevoir en retour ! votre légèreté naturelle peut être détruite ; votre attachement pour les bagatelles peut être guéri ; vos mauvaises dispositions en seront corrigées ; vos habitudes mauvaises, affaiblies et déracinées : et vous serez préparé à rendre honorable la doctrine de votre Sauveur dans toutes les scènes futures de votre vie. Soyez bien sur vos gardes cependant, si vous visitez les personnes de l’autre sexe, ou si vous causez avec elles, de peur que vos affections ne soient surprises d’une manière ou d’autre, et que vous ne trouviez alors une malédiction au lieu d’une bénédiction.
9. Puisque ce devoir nous regarde tous, riches et pauvres, vieux et jeunes, hommes et femmes (et il serait bien que les parents accoutumassent leurs enfants à ce devoir, comme ils les accoutument à répéter leurs prières et à fréquenter l’Église) qu’il nous suffise, pour le passé, de l’avoir négligé presque tous, comme par un consentement unanime. Oh ! pourquoi chacun de nous se mettrait-il dans la position de devoir dire : Seigneur, pardonne-moi mes péchés d’omission ! Eh bien ! au nom du Seigneur commençons dès ce jour à pratiquer ce devoir, d’un consentement unanime. Et surtout n’oubliez jamais, je vous en prie, que vous ne pouvez pas l’accomplir par le moyen d’un représentant, si ce n’est dans le cas où vous en êtes empêché par souffrance ou par faiblesse de santé : c’est le seul cas où il suffit d’envoyer l’assistance que vous auriez apportée vous-même. Commencez, mes chers frères, commencez maintenant : que savez-vous si l’impression que vous ressentez dans ce moment ne s’effacera pas, pour ne plus revenir ! Puis, quelle en serait la conséquence ? — Au lieu d’entendre ces paroles : venez, vous les bénis de mon père ; car j’ai été malade et vous m’avez visité, vous auriez à entendre cette terrible sentence : retirez-vous maudits ; car j’ai été malade et vous ne m’avez point visité.