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Edition numérique © cmft, octobre 2008
Rachetant le temps. (Eph. 5, 16)
1. Prenez donc garde comment, dit l’Apôtre dans le verset précédent, vous vous conduirez soigneusement, non point comme étant dépourvus de sagesse, mais comme étant sages : — épargnant tout le temps possible pour les meilleurs desseins ; rachetant chaque minute de la puissance du péché et de Satan, des mains de la mollesse, du plaisir, des affaires mondaines, avec d’autant plus de soin que les jours présents sont mauvais, — sont des jours d’ignorance, d’immoralité, et de dépravation.
2. Il parait que c’est là le sens général de ces paroles ; mais je me propose aujourd’hui de ne considérer qu’un seul moyen de racheter le temps, en ce qui regarde le sommeil.
3. Les hommes pieux se sont occupés très peu de ce sujet ; plusieurs même, qui d’ailleurs étaient très consciencieux à d’autres égards, ne l’ont pas été sur ce point : ils semblent avoir regardé comme assez différent s’ils dormaient plus ou moins ; et ne pas l’avoir considéré sous son véritable point de vue, comme une branche importante de la tempérance chrétienne. Pour que nous puissions avoir des vues plus claires sur ce sujet, je m’efforcerai de montrer,
I. Ce que c’est que racheter le temps du sommeil ;
II. Le mal qu’il y a à ne pas racheter le temps de cette manière ;
III. Et le moyen le plus efficace de le faire.
I.
1. Qu’est-ce que racheter le temps du sommeil ? — C’est en général ne consacrer au sommeil, chaque nuit, que cette portion de temps exigée par la nature, et la plus utile à la santé, à la vigueur de l’esprit et du corps.
2. Mais on objecte qu’une portion égale de sommeil ne suffit pas à tous les hommes ; — que les uns ont besoin de plus de temps que les autres ; — que la même personne ne peut pas toujours dormir les mêmes heures ; — que lorsqu’une personne est malade, ou affaiblie par une maladie ancienne, elle a plus besoin de ce restaurant naturel que lorsqu’elle est en bonne santé ; ce qui est encore le cas quand ses forces et ses esprits sont épuisés par un travail pénible et continuel.
3. Tout cela sans aucun doute est vrai et confirmé par mille faits. C’est pourquoi tous ceux qui ont essayé de fixer la même quantité de sommeil pour toute personne, ne comprenaient pas la nature du corps humain, laquelle varie tant d’individu à individu ; et ceux qui ont imaginé que la même quantité suffit, dans tous les temps, à la même personne, ne l’ont pas mieux comprise. On ne peut qu’être étonné de voir que l’Evêque Taylor ait eu cette singulière idée, et encore plus de voir qu’il ait fixé la quantité de sommeil nécessaire, à trois heures dans les vingt-quatre heures. L’excellent et célèbre Baxter ne s’approche pas davantage de la vérité, quand il suppose que quatre heures suffisent à toute personne. J’ai encore connu un homme très instruit, qui prétendait que nul être vivant ne devait dormir plus de cinq heures dans les vingt-quatre. Mais quand il voulut en faire l’essai, il fut obligé d’abandonner son opinion. Des observations nombreuses, recueillies pendant plus de cinquante années, m’ont convaincu que, malgré quelques cas extraordinaires d’hommes remarquables, qui ont vécu plusieurs semaines ou mois avec peu de sommeil, le corps humain ne peut pas conserver sa santé, sa vigueur, s’il n’a pas au moins six heures de sommeil dans les vingt-quatre. Ce qu’il y a de certain, c’est que je n’ai point connu d’homme ou de femme qui ait conservé toutes ses forces, en dormant moins que six heures.
4. J’ai observé depuis longtemps que les femmes en général ont besoin de plus de sommeil que les hommes, ce qui peut résulter de ce qu’elles sont d’ordinaire plus faibles, plus molles qu’eux. C’est pourquoi si l’on peut oser fixer une règle, sans cependant laisser de côté les exceptions et les altérations inévitables, je suis disposé à croire que celle-ci est la plus raisonnable : — un peu plus de six heures de sommeil est assez en général pour un homme sain ; un peu plus de sept heures, pour une femme saine. Quant à moi il me faut six heures et demie, et je ne peux guère faire à moins.
5. Si quelqu’un désire de connaître exactement la quantité de sommeil que sa constitution exige, il peut facilement faire l’essai que je fis il y a à-peu-près soixante ans. Alors je m’éveillais chaque nuit vers minuit ou une heure, et restais éveillé pendant quelques instants. Je conclus que cela venait de ce que je restais au lit plus longtemps que la nature l’exigeait. Afin de savoir si tel était le cas, je me procurai un réveille-matin, qui me réveilla le lendemain à sept heures, une heure plutôt que le jour précédent ; cependant la nuit suivante, je me réveillai encore. Le lendemain je me levai à six heures ; pendant là nuit le même fait arriva. Le troisième jour, je me levai à cinq heures ; et je m’éveillai encore pendant la nuit. Le quatrième jour, je me levai à quatre heures, (ce que par la grâce de Dieu, j’ai toujours fait depuis lors), et je ne m’éveillai plus. Et maintenant, prenant le long d’une année, je ne reste pas éveillé un quart d’heure par mois, dans la nuit. En faisant cet essai, c’est-à-dire en se levant de meilleure heure chaque matin, qui que ce soit peut savoir quelle quantité de sommeil lui est nécessaire.
II.
1. Mais pourquoi se donner tant de peine ? pourquoi ces scrupules ? Quel mal y a-t-il à faire comme notre prochain, à rester couché depuis dix heures jusqu’à six ou sept heures du matin dans l’été, et jusqu’à huit ou neuf heures, dans l’hiver.
2. Si vous voulez bien examiner cette question il vous faut beaucoup de candeur et d’impartialité ; car ce que je vais vous dire vous paraîtra probablement nouveau, différent de tout ce que vous avez entendu, différent du jugement, au moins de l’exemple que vous ont donné vos plus proches parents, et peut-être les personnes les plus pieuses que vous connaissez. C’est pourquoi élevez vos cœurs à Dieu, et suppliez-le de vous éclairer afin que, sans égard à qui que ce soit, vous puissiez voir et suivre la vérité telle qu’elle est en Jésus.
3. Désirez-vous vraiment savoir le mal qu’il y a à ne pas racheter du sommeil tout le temps possible, à dormir chaque jour une heure de plus que ce que demande la nature ? Eh bien ! Premièrement, cela nuit à vos affaires : — c’est perdre six heures par semaine dont vous pourriez tirer bon profit. Si vous connaissez quelque métier, vous pourriez dans ces six heures gagner quelque argent ; et fut-ce peu de chose, il n’est pas nécessaire que vous le jetiez : si vous n’en avez pas besoin vous-même, donnez-le à ceux qui en ont besoin ; vous en connaissez sans doute qui ne vivent pas loin de vous. Si vous ne connaissez pas de métier, vous pouvez encore vous employer de manière à gagner quelque argent, ou quelque chose équivalent à de l’argent pour vous ou pour les autres.
4. En dormant plus que l’exige votre constitution, vous faites tort, en second lieu, à votre santé ; rien n’est plus certain que cela, quoique ce mal, qui se glisse en nous peu à peu, ne soit pas observé ordinairement. D’une manière imperceptible, ce mal jette les premières semences de beaucoup de maladies ; en particulier il est la première cause, mais ignorée, des maladies de nerfs. On a souvent demandé pourquoi ces maladies sont plus communes de nos jours, que du temps de nos pères : — d’autres causes souvent concourent à les produire ; mais la principale cause, c’est que nous restons au lit trop longtemps. Au lieu de se lever à quatre heures, la plupart d’entre nous qui ne sont pas obligés de travailler pour leur pain, restent couchés jusqu’à sept, huit, ou neuf heures. Il n’est pas besoin de chercher ailleurs une autre cause à ces maladies : leur accroissement s’explique assez par ce mal.
5. On peut aussi observer que la plupart de ces maladies résultent non seulement de ce que l’on dort trop, mais aussi de ce que l’on reste trop longtemps dans son lit, chose regardée d’ailleurs comme très innocente ; se reposer dans des draps chauds, échauffe le corps, le rend moite ; les nerfs en sont détendus ; et par suite le cortège des symptômes de la mélancolie, — les faiblesses, les évanouissements, l’abattement, arrive au point que la vie devient un fardeau.
6. Dormir trop longtemps ou rester trop longtemps couché affaiblit souvent la vue, et procure surtout une faiblesse nerveuse dans cet organe. Quand j’étais jeune, ma vue était très faible. Pourquoi est-elle maintenant plus forte qu’il y a trente ans ? Je l’attribue d’abord à Dieu qui nous prépare pour toute œuvre à laquelle il nous appelé ; mais sans aucun doute le moyen qu’il a bien voulu bénir pour cela, c’est le lever de bon matin.
7. Une objection encore plus grande contre ce mal, c’est qu’il nuit à l’âme : — c’est un péché contre Dieu. Il faut que cela soit à cause des deux observations précédentes ; car nous ne pouvons ni dépenser, ou, ce qui est la même chose, ne pas mettre à profit notre avoir, ni affaiblir notre santé sans pécher contre Dieu.
8. Mais cette intempérance à la mode nuit aussi plus directement à l’âme : — elle sème les germes de désirs vains et insensés ; elle excite dangereusement nos appétits naturels ; elle fomente et accroît la mollesse, si souvent reprochée à la nation anglaise ; elle prépare l’âme pour tout autre espèce d’intempérance ; elle rend nos esprits si mols que nous nous effrayons du plus petit dérangement, et que nous ne voulons ni renoncer à nous-mêmes, ni nous charger de notre croix. Or, comment pouvons-nous alors (et sans cela nous devons aller en enfer) ravir le ciel ? Cette intempérance nous rend tout à fait incapables d’endurer les travaux comme un bon soldat de Jésus-Christ, et par conséquent de combattre le bon combat de la foi, et de saisir la vie éternelle.
9. Le célèbre Law traite ce sujet avec beaucoup de beauté. Je ne peux me refuser de transcrire, pour l’usage du lecteur, une partie de ce qu’il dit sur ce sujet : —
« Je prends pour une chose reconnue que tout chrétien, qui est en bonne santé, se lève de bonne heure ; car il est bien plus raisonnable de supposer qu’une personne se lève de bonne heure, par un principe chrétien, que par tout autre principe humain. »
« Nous voyons avec peine un homme au lit quand il devrait être à ses travaux : il nous est impossible de bien penser de celui qui est esclave de la mollesse jusqu’au point de négliger ses occupations. »
« Que cela nous enseigne combien nous devons paraître odieux à Dieu, lorsque nous sommes au lit, dormants, tandis que nous devrions être occupés à louer le Seigneur ; et lorsque nous sommes esclaves de la mollesse, jusqu’au point d’oublier nos devoirs religieux. »
« Le sommeil est un état d’être, si monotone, si stupide, que nous méprisons même parmi les animaux ceux qui s’y livrent le plus. Celui donc qui préfère satisfaire ce penchant, à faire ses dévotions de bonne heure, préfère le plus stupide bien-être du corps aux plus nobles jouissances de l’âme : il préfère cet état, qui est une honte chez les animaux, à cet exercice qui fait la gloire des anges. »
10. « En outre celui qui ne sait pas renoncer à ce penchant, n’est pas plus préparé, quand il est éveillé, pour là prière qu’il ne l’est pour le jeûne ou tout autre acte de renoncement. Il peut à la vérité lire des prières écrites plus facilement qu’il ne peut remplir ces devoirs ; mais il n’est pas plus disposé à un véritable esprit de prière qu’il ne l’est au jeûne. Car le sommeil, quand on s’y livre ainsi, donne une certaine mollesse à toutes nos dispositions, et nous rend incapables de jouir de quoique ce soit, si ce n’est de ce qui encourage la paresse d’esprit. De manière que l’esclave de cette paresse l’est aussi quand il est éveillé : — tout ce qui est sensuel ou efféminé lui plaît ; et tout ce qui exige de la peine ou du renoncement, lui est odieux, parce qu’il n’aime pas de se lever de bonne heure. »
11. « II n’est pas possible qu’un épicurien soit pieux : il faut qu’il renonce à sa sensualité avant qu’il puisse goûter les plaisirs de la religion. Or celui qui fait du sommeil ses délices, corrompt son âme jusqu’au point de la rendre esclave des appétits sensuels, tout autant que le fait un épicurien : il ne ruine pas ainsi sa santé, comme il pourrait le faire par des actes visibles d’intempérance ; mais par cette habitude, peu à peu, il énerve toutes ses dispositions religieuses, et précipite son âme dans la stupidité et la sensualité. »
« Le renoncement de toute espèce est la vie, l’âme de la piété ; mais celui qui n’en a pas assez pour pouvoir se livrer de bon matin à ses dévotions, ne peut pas penser qu’il suit le Christ : Quelle main droite s’est-il coupée ? Quelles sont les épreuves auxquelles il est préparé ? Quel sacrifice est-il prêt à offrir à Dieu, celui qui ne peut être assez cruel envers lui pour se lever pour prier à l’heure où bien des gens se lèvent avec satisfaction pour aller à leurs rudes travaux ? »
12. « Bien des personnes ne se feront pas scrupule d’avouer, qu’elles s’abandonnent au sommeil parce qu’elles n’ont rien à faire ; et que si elles avaient besoin de se lever, elles ne perdraient pas tant de temps à dormir. Mais on doit leur dire qu’elles se trompent ; car elles ont beaucoup de choses à faire : elles ont un cœur endurci à changer ; elles ont tout l’esprit de la religion à acquérir. Car certainement celui qui peut n’avoir rien a faire, parce qu’il n’a rien autre chose à faire qu’à prier, doit savoir certes qu’il a l’esprit de la religion à rechercher. »
« C’est pourquoi vous ne devez pas considérer si c’est une légère faute de vous lever tard ; mais vous devez réfléchir combien il est déplorable de manquer de l’esprit de religion, et de vivre dans une mollesse et dans une paresse qui vous rendent incapable de remplir les devoirs fondamentaux du christianisme. »
« Si je vous engageais à ne pas satisfaire votre gourmandise, je n’insisterais pas sur le péché de mal dépenser votre argent, quoi que ce soit un grand péché ; mais je vous prierais de renoncer à une telle manière de vivre, parce qu’elle vous maintient dans un état de sensualité qui vous rend incapable de goûter les doctrines les plus essentielles de la religion. »
« Pour la même raison je n’insisterai pas sur le péché de perdre votre temps à dormir, quoique ce soit un grand péché ; mais je vous engage à renoncer à cette indulgence parce qu’elle rend votre âme molle, paresseuse, et qu’elle est contraire à cet esprit de zèle, de vigilance, de renoncement, qui a caractérisé Christ, les apôtres, les chrétiens et les martyrs de tous les temps, et qui doit caractériser ceux qui ne veulent pas tomber dans les souillures du monde. »
13. « Voici donc la base de notre accusation contre cette habitude : — nous la blâmons, non parce qu’elle renferme tel ou tel mal particulier, mais parce qu’elle étend son influence sur toute notre âme, et qu’elle soutient un état d’esprit qui est mauvais ; elle est contraire à la piété, non point comme des méprises ou des fautes accidentelles peuvent l’être ; mais dans le même sens qu’un mauvais état de corps est contraire à la santé. »
« D’un autre côté, si chaque matin vous vous leviez de bonne heure, — par renoncement à vous-même, — pour racheter votre temps et vous préparer à la prière, vous en ressentiriez bientôt tous les avantages. Ce moyen, quoique en apparence de petite importance, peut devenir un grand moyen de piété : — il vous ferait garder toujours en vue que la mollesse et la paresse sont la peste de la religion ; il vous enseignerait à exercer l’empire sur vous-même, et à renoncer aux autres plaisirs, aux autres dépositions qui font la guerre à l’âme. — Or ce qui est ainsi planté et arrosé sera certainement béni de Dieu. »
III.
1. Il me reste à examiner comment nous pouvons racheter le temps, comment nous pouvons le plus efficacement pratiquer cette importante branche de la tempérance.
Je vous conseille, à vous qui êtes bien convaincus de cette importance, de ne pas permettre que cette conviction s’éteigne, et de commencer tout de suite à la suivre. Seulement ne vous confiez pas à votre propre force ; si vous vous confiez à vous, vous serez bientôt renversés. Sentez bien que comme vous ne pouvez rien faire de bon par vous-même, de même, dans ce cas particulier, vos forces, vos résolutions ne serviront de rien : — quiconque se confié à soi-même sera confondu. Je n’ai point connu de personne qui, en se confiant à elle-même, ait pu garder ses résolutions pendant un espace de douze mois.
2. Je vous conseille, en second lieu, de demander à Dieu des forces ; invoquez Celui qui a tout pouvoir aux cieux et sur la terre ; et croyez qu’il exaucera la prière sincère. Si vous ne pouvez pas assez vous méfier de vous, vous ne pouvez pas aussi assez vous confier à Lui. Commencez donc par la foi ; et certainement sa force s’accomplira dans votre infirmité.
3. Je vous conseille, en troisième lieu, à ajouter la prudence à la foi : servez vous des moyens les plus raisonnables pour parvenir à votre but. En particulier, pour que votre travail ne soit pas inutile, commencez bien : — si vous désirez vous lever de bonne heure, allez au lit de bonne heure ; quoi qu’il arrive faites cela : malgré les plus agréables compagnons, malgré leurs plus pressantes sollicitations, leurs reproches et leurs railleries, ne laissez pas l’heure fixée ; quand elle est arrivée, levez-vous, et sans cérémonie quittez la société ; malgré les plus pressantes affaires, n’oubliez pas cette heure : mettez-les de côté jusqu’au lendemain matin. Fut-ce même un grand renoncement, une grande croix, soyez ponctuel, à l’heure ; autrement, tout est perdu.
4. Je vous conseille, en quatrième lieu, d’être constant : sans intermission conservez l’heure fixée. Ne vous levez pas une heure pendant deux matins, pour rester tard au lit le troisième matin ; mais ce que vous faites une fois, faites le toujours. — Oui, mais ma tête souffre. — N’y faites pas attention ; cela passera bientôt. — Mais je suis endormi, mes yeux sont pesants. — Dans ce cas ne raisonnez pas, ou la résolution est perdue ; mais levez-vous de suite. Et si vous continuez à être endormi, couchez-vous un peu, deux ou trois heures après votre lever. Mais que rien ne vous fasse violer votre règle : à l’heure, levez-vous et habillez-vous.
5. « Peut-être direz-vous que le conseil est bon ; mais qu’il, vient trop tard ; — que vous avez déjà violé la règle ; — que vous vous êtes levé pendant quelque temps très régulièrement, sans que rien vous en empêchât, mais que degrés par degrés, vous avez laissé totalement de côté votre première résolution. » — Eh bien ! Au nom de Dieu, commencez de nouveau ! Commencez demain, ou plutôt ce soir même, en allant au lit de bonne heure nonobstant toute compagnie et toute affaire. Commencez avec moins de confiance en vous-même, et avec plus de confiance en Dieu qu’auparavant. — Suivez ces quelques règles, et, pour certain, Dieu vous donnera la victoire : avant peu toute difficulté sera détruite ; mais les avantages resteront à toujours.
6. Si vous dites : mais je ne peux faire ce que je faisais jadis, parce que je ne suis plus ce que j’étais : — j’ai plusieurs maladies ; mes mains tremblent ; mes esprits sont moins forts ; je suis tout affaibli ; — a cela, je réponds que tous ces symptômes sont nerveux ; qu’ils résultent en partie de ce que vous dormez trop, et qu’il n’est pas probable qu’ils soient jamais détruits, à moins que vous n’en détruisiez la cause. C’est pourquoi, non seulement pour vous punir de votre folie et de votre infidélité, mais aussi pour le rétablissement de votre santé, vous devez recommencer à vous lever de bonne heure : il n’y a pas d’autre chose à faire ; il n’y a pas d’autre moyen de rétablir assez bien et la santé de votre corps et celle de votre esprit. Ne vous suicidez pas ! Ne courrez pas dans la voie qui mène aux portes de la mort ! Ce que j’ai dit d’abord, je le dis encore, commencez de nouveau, aujourd’hui même. II est vrai que cela vous sera plus difficile qu’au commencement ; mais supportez ces difficultés que vous avez créées vous-même ; d’ailleurs elles ne dureront pas : le Soleil de justice se lèvera bientôt, et guérira votre âme et votre corps.
7. Mais ne vous imaginez pas que cette seule chose — se lever de bonne heure — suffit pour rendre chrétien. Non, quoique ce seul point — ne pas vous lever de bonne heure — puisse vous laisser païen, sans l’esprit du christianisme ; quoique ce seul point, surtout si vous avez remporté la victoire, puisse vous rendre froid, formaliste, sans vie, et incapable de faire un pas de plus dans la sainteté véritable, cependant ce seul point ne peut pas aller bien loin pour faire de vous un chrétien. Ca n’est là qu’un pas, mais cet un pas. Quand vous l’aurez fait, allez en avant : marchez à un renoncement universel à vous-même, à la tempérance en toutes choses, à la ferme résolution, de prendre chaque jour la croix que Dieu vous donne ; marchez à la recherche de tout l’esprit qui était en Christ : ainsi vous serez tout à fait chrétien ; ainsi vous finirez votre course avec joie, et vous ressusciterez à son image et serez satisfait.